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Anatomie et Cytologie Pathologiques

Déploiement du DOCCU* : un engagement tenu dans le Grand Est au bénéfice des femmes

Docteur Elisabeth ROUSSELOT MARCHE, Présidente du CRCDC Grand Est Docteur Muriel FENDER, référente régionale DOCCU du CRCDC Grand Est

L’ACTU DU DOCCU* DANS LE GRAND EST
*Dépistage Organisé du Cancer du Col de l’Utérus

Docteur Elisabeth ROUSSELOT MARCHE, Présidente du CRCDC Grand Est
Docteur Muriel FENDER, référente régionale DOCCU du CRCDC Grand Est

Madame, Monsieur, cher(e) collègue,

En ce début d’année 2023 nous ne pouvions avoir meilleur vœu que celui de continuer à œuvrer pour permettre à chaque femme de notre région un accès à un dépistage de qualité, mais aussi faire le bilan de la période précédente, un temps particulièrement challengeant pour la mise en place de ce dispositif. Le CRCDC s’y est engagé et a tenu promesse !
Ce dépistage est désormais généralisé à toute la région. Notre stratégie de déploiement volontairement progressive, partant de l’ante région Alsace qui a historiquement été le terrain d’une expérimentation pilote, a permis de consacrer sur chaque département un temps pour la formation et l’information des professionnels de santé qui sont la clé de voute du dispositif, puis d’inviter les femmes concernées avec un travail de ciblage en amont et en aval visant efficacité et efficience.

Déjà quelques résultats prometteurs

  • Les femmes de 25 à 29 ans répondent particulièrement bien aux invitations. Certaines assurées n’avaient sans doute pas encore eu de première grossesse et n’étaient pas sensibilisées au suivi gynécologique. Le DOCCU répond ainsi à un de ses objectifs, toucher les femmes éloignées du dépistage.
  • Les sages-femmes se mobilisent beaucoup pour ce dépistage, en particulier dans les départements ou la densité des gynécologues a diminué. Pour les femmes de plus de 50 ans le réflexe de les consulter ces professionnels de santé n’est pas immédiat. Aussi, les secrétaires des sites du CRCDC Grand Est sont formées à leur proposer cette solution en rappelant que les sages- femmes réalisent déjà les rééducations périnéales pour incontinence d’effort.

Des points à améliorer grâce à la mobilisation de tous !

  • Le formulaire d’invitation laisse le choix aux femmes de refuser définitivement de recevoir des courriers d’invitation/relance dans le cadre du programme de dépistage du cancer du col de l’utérus (CCU). Dans le cas d’une femme de 25 ans, cela signifie qu’elle ne sera plus
    jamais invitée sauf si elle revient elle-même sur sa décision. Ce point nous questionne et nous pourrions envisager de les intégrer de nouveau au bout de X années (à définir) pour réduire le risque de perte de chance.
  • La fluidité du parcours de soins n’est pas toujours optimale. Ainsi une femme dont les tests de dépistage et de triage sont positifs aura parfois du mal à trouver un colposcopiste pour faire un diagnostic surtout lorsque le dépistage n’avait pas été réalisé par un gynécologue.

Une mission qui ne s’arrête pas qu’à l’invitation au dépistage !

À ce jour, le CRCDC Grand Est ne recueille que très peu de résultats des tests de dépistage (20 % des cytologies et 8 % des tests HPV). De ce fait il ne peut exercer sa mission d’aide au suivi avec notamment la relance des perdues de vue.

Cette difficulté de recueil tient à plusieurs problèmes :

  • La nécessité pour les anatomo-pathologistes d’acquérir les logiciels d’extraction permettant de transmettre des fichiers à la norme exigée ;
  • L’absence de spécificité technique pour la diffusion des comptes rendus standardisés en provenance des biologistes.
  • Un outil métier du CRCDC en construction

Le CRCDC Grand Est est parfaitement conscient de l’importance de ce recueil. Les équipes des sites territoriaux sont mobilisées pour obtenir et saisir le maximum de données.

Ce bilan en demi-teinte est loin de nous satisfaire mais rappelons s’il en était besoin que le dispositif est récent. Seulement 4 ans se sont écoulés depuis le démarrage, entrecoupés par la crise du COVID.
Il n’empêche que des progrès s’opèrent : le département des Ardennes dont les femmes sont parmi les moins bien dépistées, enregistre désormais une couverture supérieure à la moyenne régionale, s’agissant d’un des 2 premiers engagés dans le dispositif, cela augure d’une augmentation de la participation pour l’ensemble de la région.

Toutes les coordonnées des sites territoriaux sont disponibles sur www.depistagecancer-ge.fr

Parole au Professeur Christine CLAVEL

PU-PH Biologie Cellulaire – Biologiste (Reims)

Le dépistage du CCU a bénéficié d’avancées majeures depuis la dernière décade. Si la prévention primaire par vaccination prophylactique anti-HPV chez les jeunes filles et garçons de 11 à 14 ans est l’enjeu principal contre le CCU et d’autres cancers HPV-induits, le dépistage du CCU, en prévention secondaire, reste important en attendant une plus forte couverture vaccinale en France et dans le monde. Le dépistage organisé est supérieur au dépistage individuel non organisé. Le prélèvement cervico-utérin en milieu liquide adéquat (accrédité pour le test HPV et la cytologie) est essentiel et l’utilisation d’auto-prélèvements (pour un test HPV et non pour la cytologie) est importante, notamment chez les femmes ne voulant pas bénéficier d’examen gynécologique.

L’HAS a ainsi validé en 2019 le nouveau dépistage du CCU organisé, avec dépistage primaire par test HPV chez les femmes > 30 ans, car ce test est plus efficace.
Le but du dépistage est d’augmenter la participation pour réduire les diagnostics tardifs. Le test HPV permet de détecter plus rapidement des lésions de détecter plus rapidement des lésions précancéreuses et le risque d’une lésion de CIN3+ est très faible chez les femmes HPV négatives. Pour les femmes de 25 à 29 ans, le dépistage par examen cytologique est maintenu.

« Les données montrent que ce dépistage HPV monte en puissance »

Ce changement de dépistage a modifié les pratiques cliniques, anatomo- pathologiques et biologiques et ce, en fonction de l’âge des femmes dépistées. Cette nouvelle mise en place du dépistage est conséquente, avec les tests HPV, la diminution des examens cytologiques, l’augmentation du nombre de colposcopies qui pourrait doubler et enfin la transmission de toutes ces données. Concernant les tests HPV, la cytologie et la colposcopie, une standardisation des modalités et des contrôles de qualité est nécessaire.

Des données récentes montrent que ce dépistage HPV monte en puissance
même si certains praticiens utilisent dépistage HPV monte en puissance même si certains praticiens utilisent encore le « cotesting » pour les femmes > 30 ans (test HPV et cytologie systématiquement), ce cotesting ne devrait pas être fait. Dans le Grand Est, le test HPV est utilisé dans 60 % des cas de dépistage après 30 ans en 2022, alors qu’avant 30 ans, c’est la cytologie qui prédomine (77 %).

Communication et informations demeurent indispensables, surtout chez les femmes non participantes. Il faudra encore du temps pour pouvoir évaluer le suivi correct des femmes HPV positives ou négatives, avec ou sans colposcopie, avec la présence de lésions ou non, avec les traitements et le suivi post-thérapeutique par test HPV afin d’éviter les récidives (dans 5 à 20 % des cas). A moyen et à long terme, les programmes de dépistage s’adapteront à la notion du risque HPV et du risque tumoral, avec l’espacement des tests de dépistage et de triage en fonction de la couverture vaccinale anti-HPV.

Parole à Madame Marie BAUER

Sage-femme libérale (Longeville-lès-Metz)
Présidente de l’URPS des sages-femmes du Grand Est

Cela a été dit dans l’éditorial, le 1er objectif du DOCCU est d’augmenter la participation des femmes.

Améliorer la couverture de dépistage passe par l’accès aux soins …

Ma profession médicale est particulièrement impliquée dans les dépistages. La prévention est au cœur de la pratique quotidienne d’une sage- femme, quel que soit le mode d’exercice. Notre implication, ainsi que celle de nos collègues médecins généralistes et gynécologues, permet d’améliorer la possibilité de dépistage pour les femmes. Dès réception de l’invitation du CRCDC avec le flyer, les femmes peuvent prendre RDV auprès du professionnel de santé (PS) le plus proche, ou le plus accessible, et de réaliser le dépistage. De plus, en terme de bénéfice secondaire, certaines femmes ont l’occasion de reprendre un suivi gynécologique de prévention après l’avoir suspendu des années.
Par ailleurs, pour les patientes ne pouvant se déplacer, toutes les initiatives du « aller vers » sont également à promouvoir et à soutenir.

… Par la facilité et la simplification de l’exercice professionnel quotidien …

Les dialogues régionaux du Conseil National de la Refondation, fin 2022, ont pointé le manque de ressources et de temps des PS pour faire de la prévention individuelle*. Le DOCCU est clairement un gain de temps dans ma pratique. Recevoir une patiente avec son courrier, avertie de l’intérêt et du déroulé du dépistage, a de nombreux avantages. Outre le côté très pratique des étiquettes pré- remplies, la consultation se déroule de manière plus fluide, et je trouve que l’obtention du consentement libre et éclairé est favorisée.

… Et par un modèle de prévention globale.

La prévention du CCU est transversale et implique divers acteurs et actions (vaccination, délivrance adaptée des informations, formation continue).
Il est de notre devoir de délivrer une information juste, en accord avec les données scientifiques du moment. N’oublions pas qu’un discours interprofessionnel cohérent est rassurant.

* Source CRSA Grand Est, restitutions prévues en janvier 2023

Le dépistage organisé du cancer est efficace
Parole au Professeur Jean-Jacques BALDAUF

Professeur émérite en Gynécologie au CHU d’Hautepierre (Strasbourg)
Vice-Président du CRCDC Grand Est

J’ai eu l’honneur et le privilège de présider l’association qui a organisé le dépistage du CCU à partir de 1994 dans le cadre d’une campagne régionale pilote en France. Son objectif a été d’obtenir une meilleure participation des femmes âgées de 25 à 65 ans et d’assurer une démarche d’assurance qualité pour toutes les étapes grâce à un suivi des résultats du dépistage.

La participation des femmes a augmenté pour atteindre des taux comparables à ceux observés dans les pays du nord de l’Europe ; 71,2 % des femmes ont bénéficié d’au moins un frottis dans les 3 ans, elles sont 82 % à 5 ans. Le coût de fonctionnement annuel de la campagne était de 1,2 € par femme ciblée. Cette organisation du dépistage a permis de réduire le nombre de cancers diagnostiqués et de décès liés à ces cancers, de respectivement 16,1 % et 19,5 % avec un coût de 22 700 € par année de vie sauvée*.

L’histoire de Madame … illustre parfaitement cette efficacité : il s’agit d’une patiente réfugiée politique, âgée de 45 ans, qui n’avait pas bénéficié de dépistage depuis plus de 15 ans. Un frottis prélevé dans une structure médico-sociale est en faveur d’une lésion intraépithéliale de haut-grade. La biopsie sous colposcopie réalisée rapidement a montré une CIN3 dont l’exérèse complète par conisation a été obtenue 5 mois plus tard. Un premier contrôle post-thérapeutique à 6 mois est normal alors que le deuxième frottis de contrôle prélevé à 20 mois révèle une lésion intraépithéliale de haut-grade.
À partir de ce stade, la patiente est perdue de vue, ne venant pas à la colposcopie malgré une première relance par la structure d’organisation du dépistage.
Grâce à une 2ème relance, par lettre recommandée, un diagnostic de récidive de CIN3 a pu être porté. Une deuxième conisation a été réalisée 13 mois après le frottis pathologique, révélant un foyer micro invasif débutant.
La RCP a proposé une hystérectomie complémentaire, compte-tenu de l’âge et de la compliance aléatoire de la patiente. Aucune néoplasie résiduelle n’a été révélée. Nul doute que l’action de la structure d’organisation du dépistage a évité la survenue d’un cancer plus avancé !!!

« Cette organisation a permis de réduire le nombre de cancers diagnostiqués et de décès liés à ces cancers »

L’extension, à partir de 2019, de l’organisation du DOCCU à l’ensemble du territoire français, concomitante à l’introduction du test HPV comme nouvel outil de dépistage, constitue un vrai défi et une formidable opportunité pour réduire encore davantage le nombre de décès liés au CCU.

* Levy-Bruhl D, Kudjawu Y, Dervaux B, Lehne X. Modélisation médico-économique de l’impact de l’organisation du dépistage du cancer du col utérin et de l’introduction de la vaccination contre les HPV dans le calendrier vaccinal (synthèse) Rapport INVS Mars 2007.

Le DOCCU dans le Grand Est en quelques chiffres

  • 1 450 000 femmes de 25 à 65 ans ;
  • 702 923 invitations envoyées aux femmes non dépistées entre 2019 et 2021 ;
  • 167 066 ont été relancées car elles n’avaient pas réalisé de dépistage dans l’année qui suivait ;
  • Le taux de réponse aux invitations est de 18,1 % chez les 25-29 ans et de 10,4 % chez les 55-65 ans.
Déploiement des invitations

Quelques messages pour vos patientes et les femmes de la région

  • L’espacement des tests de dépistage ne dépend pas de l’âge mais du test réalisé ; le frottis cytologique doit être renouvelé tous les 3 ans alors que le test HPV peut être espacé tous les 5 ans.
  • L’ auto prélèvement est pour l’instant réservé aux femmes chez qui un prélèvement cervico-utérin ne peut être réalisé par le professionnel de santé. La demande au laboratoire doit être accompagnée d’une prescription mentionnant le praticien responsable du suivi.

Parole aux autres acteurs clés de terrain

Docteur Julia GADETSKAYA, Médecin Généraliste (Charleville-Mézières)

« La médecine générale est avant tout une médecine de prévention, c’est à nous de faire passer le message, d’éduquer la population en adaptant l’information à chacun. Ayant toujours été convaincue de la nécessité d’inclure l’acte du frottis cervico-utérin dans nos consultations « de routine » j’incite tous mes confrères à le faire. Certes, cela prend 5 à 10 minutes de plus mais c’est l’une des seules majorations tarifaires que l’on peut ajouter légalement à la valeur de G. Profitons-en ! 5 minutes tous les 5 ans ! Nos patientes nous font confiance ! »

Docteur François JOPPIN, Médecin spécialiste en Biologie Médicale (Metz)

« La biologie médicale a un rôle important à jouer dans l’amélioration de la prévention du CCU en rendant par son maillage territorial et sa proximité, une plus grande accessibilité à la réalisation d’un prélèvement HPV. Notre participation au DOCCU s’inscrit non seulement dans la volonté de notre groupe d’être acteur dans les domaines de prévention et de dépistage, mais lui permet également de mettre son expertise, ses moyens techniques, de recherche et d’innovation au service de missions de santé publique. »

Docteur Stéphane KIRCHNER, Anatomo-Cyto Pathologiste (Nancy)

« Le DOCCU a été initié il y a plusieurs années dans la région Grand Est et aujourd’hui tous les départements participent à la campagne. Nous ressentons pleinement la montée en charge du programme. En effet, le nombre de tests en provenance du DO est passé, depuis 2020, de moins de 1 % de notre volume total de tests cervico-utérins (frottis + HPV) à plus de 10 % actuellement. Nous constatons que cela a permis de toucher une population sous-dépistée (dernier dépistage effectué il y a 7 à 15 ans !) et d’y déceler des anomalies parfois avancées (lésions de haut-grade). Nous espérons que cette campagne permettra de sensibiliser la population à un dépistage plus régulier.
3 axes d’amélioration nous paraissent néanmoins importants :

  • que les prescripteurs n’oublient pas, en plus de l’étiquette DOCCU, leur cachet ou la spécification de leur identité afin qu’ils puissent recevoir le résultat ;
  • que les patientes pensent à apporter le courrier d’invitation à la consultation gynécologique afin que l’étiquette arrive avec la demande d’examen et déclenche un 1/3 payant. En cas d’oubli, il suffit que les patientes en informent le préleveur qui pourra le noter sur la demande d’examens. Ceci évitera une facturation de l’examen à la patiente qui devra transmettre à notre secrétariat les informations nécessaires au 1/3 payant ;
  • que l’éditeur de notre système de gestion de laboratoire nous fournisse enfin la version actualisée du module d’extraction des données à transmettre au CRCDC Grand Est, afin que ce dernier puisse exercer l’ensemble de ses missions. »

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Newsletter DOCCU du CRCDC Grand Est
Responsable de rédaction : Dr Elisabeth ROUSSELOT MARCHE
Rédacteurs : l’ensemble des invités de ce numéro que nous remercions
Relecture et conception : Équipe communication du CRCDC Grand Est

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